La gestion durable de l’eau constitue un enjeu essentiel et complexe. Elle requiert des dépenses et des investissements. Elle génère des recettes. Elle impacte donc notre quotidien, sans omettre ses impacts financiers pour chacun.
Quelques principes de base
On parle de « petit cycle de l’eau » ou « cycle domestique de l’eau » – production d’eau potable, assainissement, entretien des réseaux de distribution et de collecte, etc. .. par comparaison au « grand cycle de l’eau » qui concerne la circulation naturelle de l’eau sur la Terre.
Le financement de ces dépenses repose sur un grand principe.
« L’eau paie l’eau » : les coûts générés pour distribuer de l’eau potable et assainir les eaux usées doivent être pris en charge par les usagers de ces services publics. C’est en application de ce principe que l’eau potable est facturée aux abonnés du service d’eau : l’argent collecté permet de financer le service.
En France, ouvrir un robinet ou tirer la chasse d’eau sont des gestes de la vie quotidienne. Mais ces gestes anodins sont rendus possibles grâce à tout un processus impliquant de prélever l’eau dans les milieux, la rendre potable, la distribuer, puis, après son utilisation, la collecter, la dépolluer et la rejeter dans la nature.
Ce cycle de l’eau domestique est artificiel. Il est assuré grâce à un ensemble d’infrastructures et d’acteurs ayant un rôle précis : pomper l’eau, la traiter, l’acheminer, etc.
Sa gestion est assurée par les services publics d’eau et d’assainissement. De la responsabilité des collectivités locales, cette gestion couvre deux grandes missions : d’une part l’alimentation en eau potable, d’autre part l’assainissement des eaux usées. C’est ce qui explique que l’eau ait un coût : les missions assurées par ces services génèrent des investissements et des frais de fonctionnement pour la collectivité, qui sont payés par les usagers de l’eau (les abonnés du service d’eau) au travers de la facture d’eau. Sur Clermont Auvergne Métropole (CAM), l’eau consommée arrive pour 30% de la chaine des Puys par gravitation et de la plaine alluviale de l’Allier pour 70%.
Des tarifs différents, résultant de plusieurs causes :
La distorsion des prix tient à la qualité de l’eau recueillie, sa situation géographique, la densité de populations… de nombreux facteurs entrent en ligne de compte ce qui explique (en partie) le grand écart d’un lieu à un autre.
Mais, les choix politiques et techniques comptent pour beaucoup et sont essentiels pour un bien qualifié de vital.
Avant que la Métropole ne prenne en charge la gestion de l’eau, assainissement et gestion des milieux aquatiques, chaque commune gérait comme elle l’entendait ces services, d’où des écarts tant sur les prix que sur la qualité des réseaux. Certaines collectivités se sont « associées » en créant des syndicats intercommunaux, d’autres ont fait le choix de confier à des partenaires privés (Délégation de Service Public), d’autres enfin ont crée des régies (collectivité gère sa propre distribution). Pour l’assainissement, les contraintes étant plus lourdes, les collectivités ont été plus enclines à se fédérer.
Concrètement sur CAM
cartes sur le site https://www.clermontmetropole.eu/preserver-recycler/cycle-de-leau/facturation/
Pour l’eau potable :
AUBIERE-LE CENDRE-ROMAGNAT dépendent du Syndicat mixte Région ISSOIRE (Distributeur SUEZ)
CHATEAUGAY Syndicat Plaine de RIOM (SEMERAP)
BLANZAT-CEBAZAT-GERZAT-NOHANENT-AULNAT-LEMPDES-PONT DU CHATEAU Syndicat Basse Limagne (SEMERAP)
BEAUMONT Délégation de Service Public (VEOLIA) fin 2021 rentrera dans la régie Métropolitaine
CHAMALIERES DSP ( SAUR) 2026
DURTOL-ORCINES-St GENES CHAMPANEL-CEYRAT-CLERMONT Fd- COURNON-ROYAT-PERIGNAT LES SARLIEVES sont en régie .
Pour l’assainissement
CHAMALIERES (SAUR) 2026 –
AULNAT (SEMERAP) 2021 intègreront la régie.
LEMPDES-PONT DU CHATEAU resteront dans le syndicat intercommunal d’origine
BILAN, UN PATCHWORK QU’IL FAUT TENTER D’UNIFORMISER.
Lorsque l’on paie une facture d’eau, ce n’est pas l’eau prélevée dans la ressource que l’on paie mais le coût de l’ensemble des services rendus pour bénéficier d’une eau potable, à domicile, toute l’année et sans interruption et, dans la majorité des cas, de la dépollution des eaux usées. Il est donc plus juste de parler du « prix des services de l’eau et de l’assainissement ».
Nos observations
L’Atelier de Gauche lors de réunions publiques avait abordé des risques résultant de la Métropolisation. Mutualiser n’est pas forcement une mauvaise chose, mais certains citoyens vont être à nouveau mis à contribution pour ceux qui n’ont pas fait le travail.
Un exemple : Une commune comme Beaumont a un rendement conforme à sa catégorie (83%) alors que Ceyrat est en deçà de 50%. Il va falloir rattraper ces retards et les coûts seront supportés par tous.
Autre exemple : Beaumont avait, sous responsabilité d’une gouvernance de Gauche, fait installer la télé relève pour le comptage. Ce système présente de nombreux avantages (contrôle et alerte en cas de fuite ce qui induit de ne pas prendre d’assurance…). Sur de nombreuses communes il n’y a même pas la radio relève (équipement qu’il faudra budgéter). Lors de la mutualisation, il faut éviter que Beaumont ne perde cet équipement.
Un prix commun de l’eau potable 10 est-il une bonne chose ? La réponse reste ouverte.
Chaque commune va être impactée avec des plus, des moins et parfois les deux dans un sens ou l’autre.
L’intérêt collectif doit primer sur un sujet aussi sensible que l’eau. Les périodes de sécheresse nous rappellent à la réalité.
Ce qui induit un investissement lourd mais incontournable de renouvellement des réseaux pour améliorer le rendement. Sécuriser l’approvisionnement en bouclant des circuits, nouveaux captages… . De même pour l’assainissement et le retour dans le milieu naturel.
Quelques situations et leurs impacts
Le principe d’équité doit prévaloir. Plusieurs exemples :
N’est-il pas logique d’intégrer différemment le besoin lié au remplissage d’une piscine de 80m3 et celui d’un foyer modeste utilisant l’eau pour ses besoins courants ?
Pourquoi une inégalité forte entre un abonné (maison individuelle) qui acquitte une facture incluant abonnement + consommation et des usagers en collectif sans compteur spécifique et paient donc sur une base unique (avec « gagnants » et « perdants » et surtout sans incitation à une recherche d’économie) ?
Concrètement, prenons le cas de BEAUMONT, un prix plus « social » a été mis en place pour les 15 premiers m3. L’abonné en bénéficie, l’usager en collectif quasiment pas. A ROYAT, au-delà d’un nombre de m3 consommé le prix augmente, ce sont donc les habitats collectifs qui sont pénalisés puisqu’il n’y a qu’un seul compteur. Ces deux cas nous montrent que moduler le prix au m3 n’est pas « la » solution équitable « miracle ».
Quelques « pansements mineurs » ?
Il est possible de réfléchir à quelques pistes locales et variées. Toutes méritent discussions, projections, évaluations et ajustements.
L’abonnement et sa gratuité ?
Des aides par l’entremise de caisses (type Allocations Familiales) ?
Le «chèque Eau» ?.
Mais, de telles mesures, non automatiques et -comme d’autres aides sociales- méconnues donc peu utilisées sont de peu d’impact. Sans pour autant être à négliger. Surtout si une information large et ciblée est assurée par les responsables locaux (élus de proximité en particulier). Mais pourquoi ne pas chercher ailleurs ?
Des pistes à explorer
On l’a indiqué en début de cette contribution : les services Eau-Assainissement ont un coût qui, en bout de course, est assumé par l’usager. Donc, si rechercher un système de facturation plus équitable est nécessaire, il est plus prometteur de réfléchir-travailler-agir en amont… au niveau des coûts. Si les coûts diminuent, la facturation devra baisser. Et là, l’action de chacun.e est importante. Car chacun.e. est en droit de demander à ses élus de proximité ce qui est fait en matière d’approvisionnement, de distribution, de suivi, d’assainissement.
Exemple : un réseau de collectes qui sépare (réseaux séparatifs) les eaux de pluie des eaux usées (donc polluées) permet de rendre au milieu naturel ces eaux de pluie (disposition théoriquement imposée par la législation). Par contre, un réseau qui mélange tout (réseau unitaire) impose, en aval, des systèmes de traitement des eaux usées (avec des coûts d’investissement et d’entretien énormes). Outre le milieu naturel, c’est le porte-monnaie de l’usager qui est fortement impacté.
Dans cette perspective, …
Jouer sur la TVA (5,5% pour l’eau) (10% pour l’assainissement) serait un levier en réduisant tout à 5,5% par exemple mais ce n’est pas du ressort de la collectivité.
En cas du choix d’augmentation, il faudra une progressivité dans le temps et des accompagnements aux plus démunis.
La question est : Où met-on le curseur si la collectivité décide d’un prix unique ?
En la matière, il est indispensable d’explorer toutes les pistes.
- Ainsi, une expérimentation est menée sur 50 collectivités (de grandes métropoles à structures bien plus petites) depuis plusieurs années
- (.ecologie.gouv.fr.bilan-2019-lexperimentation-tarifaire-sociale-de-l’eau). Ses résultats devraient être connus en avril 2021. Il faut que le travail mené soit évalué et potentiellement suivi d’effet (Cf présentation du dispositif -extrait Wikipedia mars 2021. PJ).
- D’autres réflexions existent comme celle émanant de la Convention Citoyenne pour le Climat -page 123 de son rapport final
convention citoyenne pour le climat-rapport-final
- même si, vu la mission confiée, le thème ne concerne que le traitement de l’eau. Plusieurs CESER (Conseils Economiques Sociaux Environnementaux Régionaux) ont produit des rapports. Et ainsi de suite… Bref, il existe une masse documentaire considérable et la plupart du temps de valeur. (voir plusieurs liens mis en ligne sur le site de l’Atelier de Gauche). Et pourtant, ces travaux semblent totalement négligés par «nos» élus lors des prises de décision. Pourquoi ? Sans doute car pour la plupart, ils sont ignorés. Pour certains élus, leurs positions dépendent des arrangements politiques locaux. Enfin, pour les élus minoritaires, leur parole n’est pas entendue, pire elle n’est pas écoutée….Inutile d’en rajouter.
Conclusion
Il est impossible de conclure. Cette contribution de l’Atelier de Gauche est certes incomplète. Du moins avons-nous pris soin de communiquer nombre d’informations, de clarifier plusieurs notions, d’avoir soulevé des interrogations et proposé des suggestions.
La chaîne de l’eau est complexe et tous les maillons doivent être travaillés avec le sens de l’intérêt collectif, en gardant à l’esprit que cet intérêt collectif doit préparer le futur et contribuer à une approche vraiment sociale et équitable.
Si ce thème vous intéresse, n’hésitez pas à contacter l’Atelier de Gauche du Canton Beaumont – Ceyrat – Saint-Genès-Champanelle.
L’Atelier de Gauche – Mars 2021
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1 réflexion au sujet de « La gestion d’un bien public : l’eau »