Justice fiscale. À l’initiative du groupe GDR (Groupe de la Gauche démocrate et républicaine), vingt-cinq députés (voir à la fin du texte) invitent à instituer la « taxe Jean Valjean », proposée par le comédien Vincent Lindon.
Entretien avec Sébastien Jumel, député PCF de Seine-Maritime
La création d’une « taxe Jean Valjean » a été ignorée par Emmanuel Macron. Pourquoi avoir décidé de la faire entrer au Parlement ?
Sébastien Jumel Le 6 mai, quand j’ai vu la vidéo de Vincent Lindon sur Mediapart, j’ai été bouleversé parce que j’ai considéré qu’elle était juste, sincère et pleine d’humanité. Comme les députés PCF n’ont cessé de le faire, cet appel éclaire de manière salutaire la compréhension des liens qui existent entre l’affaiblissement de nos services publics, la montée des inégalités et les décisions politiques qui frappent les plus faibles. Vincent Lindon résume ainsi l’action de l’exécutif : « Des offrandes pour ceux qui n’ont besoin de rien, des sacrifices pour ceux qui ont besoin de tout », et propose d’y remédier. Ses mots m’ont causé.
Que contient la proposition de résolution ?
Sébastien Jumel Dans notre pays, les 10 % les plus fortunés possèdent 50 % de la richesse nationale. Près de 12,4 millions des Français sont exposés aux risques économiques et sociaux en pleine crise du coronavirus, et 21,4 millions sont exonérés d’impôts sur le revenu, faute de moyens. Dans cette situation, la taxe dite Jean Valjean propose de prendre aux riches pour donner aux pauvres. Il s’agit de mettre à contribution les plus hauts patrimoines du pays sous la forme d’une taxation de 1 à 5 % pour ceux évalués à plus de 10 millions d’euros. Ces riches ne connaîtront pas de fins de mois difficiles, et cela amènerait 34 milliards d’euros de recettes. La première année, 2 000 euros seraient versés aux 21,4 millions de Français cités plus haut. L’année suivante, cette somme viendrait renforcer nos services publics, avec en priorité l’hôpital. Enfin, des sanctions sont proposées contre l’évasion fiscale, qui nous coûte 7 % du PIB chaque année, et le RIP serait possible dès 1 million de signatures.
Elle porte le nom du personnage du roman les Misérables, de Victor Hugo. Que vous inspire-t-il ?
Sébastien Jumel Victor Hugo a dit : « Rien n’est solitaire, tout est solidaire. » Dans un discours à l’Assemblée, il s’est écrié : « Détruire la misère ! Oui, cela est possible. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en pareille matière, tant que le possible n’est pas fait, le devoir n’est pas rempli. » En relayant l’appel de Vincent Lindon, j’exerce, avec 24 de mes collègues, mon devoir de parlementaire. La crise du coronavirus agit comme un accélérateur de particules : les inégalités territoriales, sociales et fiscales ont d’autant plus éclaté au visage de la France. La taxe Valjean propose que le monde d’après ne ressemble pas à celui d’avant.
Les 25 députés :
Sébastien JUMEL, Clémentine AUTAIN, Alain BRUNEEL, Pierre DHARRÉVILLE, Jeanine DUBIÉ, Jean‑Paul DUFRÈGNE, Frédérique DUMAS, Caroline FIAT, Christian HUTIN, Régis JUANICO, Manuéla KÉCLARD–MONDÉSIR, Bastien LACHAUD, Jean‑Paul LECOQ, Jean‑Luc MÉLENCHON, Jean‑Philippe NILOR, Danièle OBONO, Stéphane PEU, Dominique POTIER, Loïc PRUD’HOMME, Muriel RESSIGUIER, Jean‑Hugues RATENON, Fabien ROUSSEL, Sabine RUBIN, François RUFFIN, Hubert WULFRANC,
Ce sont essentiellement des élus issus des groupes PCF et LFI qui soutiennent l’initiative. Il y a par ailleurs l’ancien socialiste Régis Juanico, ainsi que l’ex-marcheuse Frédérique Dumas et la radicale de gauche Jeanine Dubié, toutes deux membres du groupe Libertés et Territoires.